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Je ne dois pas être très gourmand ou alors, plutôt, un peu obsédé par les plantes : pour moi, le mot « millefeuille » ne m’a jamais évoqué une pâtisserie à la fois croquante et crémeuse qui, tout compte fait, m’écœure un peu. Non, le millefeuille me fait penser à une pelouse mousseuse de pousses d’un vert tendre, à des bords de chemins estivaux, colorés en rose vif par les fleurs d’une variété montagnarde, à des automnes parfumés de l’odeur camphré des sommités fleuries qui aromatisent les desserts… Bref, j’aime l’achillée millefeuille à tous ses stades de développement.

Au printemps, ses toutes jeunes pousses sont un délicat duvet, parfait pour étoffer les salades et les relever d’une bouffée d’arôme des prés. Leur découpe en fins segments allongés, leur grâce aérienne et leur forme effilée les ont fait surnommer « sourcils de Vénus ». Mais avec l’âge, les feuilles s’embroussaillent et oublient leur douceur. On peut encore les hacher à la façon du persil, en condiment, ou les cuire à l’eau, puis les sauter rapidement au beurre comme autrefois en Angleterre. Je le fais parfois, mais je préfère l’huile d’olive et, tout à la fin de la cuisson, quelques gouttes de tamari (sauce de soja) pour en relever la saveur.

Les feuilles développées ne sont pas sans vertus, comme j’en ai fait l’expérience. Il arrive parfois que mon nez, sans raison apparente, se mette brutalement à saigner. J’ai eu l’occasion d’imbiber plusieurs mouchoirs avant de trouver la parade : un bouchon de feuilles de millefeuille écrasées placé dans la narine stoppe presque instantanément et radicalement le saignement. Le tout est que cela n’arrive pas dans le métro, mais plutôt dans les prés…

En tout cas, ce n’est pas moi qui l’ai inventé : le nom botanique du genre Achillea vient de ce que le héros grec Achille, conseillé par Vénus, s’en serait servi pour soigner ses guerriers blessés au combat. Quoiqu’il en soit, les cataplasmes de feuilles fraîches écra­sées ­pos­sè­dent des pro­prié­tés cica­trisantes et sont utilisés depuis l’Antiquité pour soigner coupures et blessures. D’où le surnom d’« herbe au charpentier » que l’on donne également au millefeuille.

C’est toujours avec joie que j’attends l’apparition des premières fleurs du millefeuille. J’aime particulièrement l’odeur camphrée, puissante et suave à la fois, qui s’en dégage lorsque je les froisse entre mes doigts. J’ai été très surpris d’apprendre, il y a de cela… plusieurs vies, qu’en fait, les petites fleurs blanches sont de mini-capitules, composés de fleurons liliputiens, les uns en tubes, au centre, les autres en courte languette sur le pourtour. Il faut les observer de près pour se régaler de leur délicate architecture.       

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Les inflorescences aromatisent magnifiquement les crèmes, les flans et d’autres desserts. C’est l’un de mes aromates favoris à l’automne – entre autre, il faut l’avouer, parce qu’à la fin de la saison, la nature n’est plus aussi prodigue… On s’en est servi aussi pour aromatiser la cervoise, dont le millefeuille était censé augmenter l’effet enivrant… Et en Allemagne au XVIe siècle, les capitules étaient mis dans les tonneaux pour assurer la conservation des vins. Ils forment une agréable boisson si on les fait macérer dans de l’eau dans un récipient de verre transparent laissé quelques heures en plein soleil.

Les capitules donnent une infusion amère qui tonifie l’organisme, facilite le travail du foie et favori­se la venue des règles, sans provoquer d’accident en cas de grossesse ignorée. Mais on signale que l’usage prolongé du millefeuille pourrait engendrer la photosensibilisation de la peau.

En Chine, les tiges de millefeuille étaient utilisées pour consulter l’oracle du Yin-King, car on leur prêtait des vertus divinatoires…

Encadré botanique

Millefeuille ? Ce n’est pas tout à fait vrai : je n’ai jamais vraiment pris le temps de les compter, mais il n’en a pas véritablement mille… En fait, chaque feuille, étroite et allongée, est profondément divisée en nombreux segments très minces disposés dans des plans différents, ce qui donne à l’ensemble un aspect vaporeux et touffu. 

Le millefeuille est une plante vivace, qui dégage lorsqu’on la froisse une agréable odeur aromatique un peu camphrée. Au cours de l’été, des tiges raides sur­gissent du centre des rosettes. Elles sont coiffées de juin à novembre d’une inflorescence aplatie, un « corymbe », formée de petits capitules blancs ou parfois, surtout en montagne, d’un beau rose plus ou moins soutenu. Leur parfum est en même temps plus puis­sant et plus délicat que celui des feuilles.

Le millefeuille pousse, souvent en colonies, dans les prés et les bois clairs, sur les talus et au bord des chemins dans toutes nos régions.

Avant la floraison, les feuilles finement découpées du millefeuille pourraient éventuellement être confondues avec celles d’une Ombellifère, voire d’une fougère, mais la confusion est improbable. À la floraison, les inflorescences aplaties du millefeuille ressemblent superficiellement à de petites ombelles, mais leur arôme caractéristique devrait aider à les distinguer facilement de toute autre plante.

Recette : Flan à l’achillée millefeuille

1 l de lait d’amande, 4 g d’agar-agar, 1 cuillerée à soupe de sucre, 100 g de sommités fleuries d’achillée millefeuille

  • Délayez l’agar-agar dans le lait d’amande, ajoutez le sucre et portez à ébullition.
  • Retirez du feu.
  • Hachez grossièrement l’achillée millefeuille et mettez-en la moitié à infuser dans le lait pendant dix minutes. 
  • Ajoutez le reste de millefeuille dans le lait et mixez, puis filtrez sur une passoire fine.
  • Versez dans des ramequins et laissez refroidir au frais.

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