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Dans mes jeunes années lointaines, ma passion dévorante concernait la musique. Par un long concours de circonstances, je me trouvai amené à m’occuper avec un ami d’une troupe de musiciens de Haute Égypte, pays que où je résidai alors quelque temps. C’est là que je découvris la molokhia, une véritable « fondue végétale », préparée avec les feuilles de la corette potagère, une cousine du jute qui donne les toiles. Elles sont cuites dans un peu d’eau, puis assaisonnée et réduites en purée à l’aide d’un « mixer » primitif formé d’un bâton terminé en bas par deux courtes tiges de bois disposées en croix et roulé rapidement entre les paumes des mains. De retour en France, je cherchai avec quelle plante reproduire ce plat national égyptien et mon choix s’orienta fort naturellement sur la mauve, une cousine de la corette.

Tout dans la mauve est douceur : la forme arrondie de ses feuilles, ses fleurs harmonieuses dont la couleur a pris le nom de la plante, ses fruits circulaires que les enfants nomment « fromages » et grignotent lors de leurs dînettes… J’aimais bien pratiquer moi-même cette innocente dégustation et m’étonnais toujours de l’étrange texture qui m’emplissait la bouche. C’est que tout la plante, de ses racines jusqu’à ses fruits, renferme en quantité une substance gluante, du mucilage – le terme vient de « mucus ». On aime ou l’on aime pas, mais ce composé particulier, formé de longues chaînes de glucides, possède des vertus adoucissantes qui permettent à la mauve de guérir toutes les inflammations, externes ou internes, sous forme de compresses ou de décoctions. C’est pour cela aussi que la mauve est réputée comme laxatif, propriété qui peut s’avérer fort utile et que l’on sait mettre à profit depuis l’antiquité : Cicéron dans l’un de ses nombreux écrits, affirme avoir eu coutume de se « lâcher le ventre », lorsque le besoin s’en faisait sentir, en consommant de la soupe de mauve. 

La mauve, en effet, est un excellent légume sauvage, dans lequel tout se mange. J’aime ajouter ses jeunes feuilles à mes salades, de même que les fleurs qui les agrémentent de leur beauté. Ce sont les feuilles plus âgées, soigneusement débarrassées de leur pétiole, qui me servent à préparer une fondue végétale indigène, toujours appréciée lors de mes stages. On peut les mettre en œuvre de bien d’autres façons plus classiques, seules ou mélangées à d’autres légumes sauvages ou cultivés. Les feuilles de mauve présentent, du fait de leur mucilage, la particularité d’épaissir les soupes sans qu’il soit besoin d’y ajouter des féculents comme des pommes de terre.  Avec les fleurs, il m’arrive de préparer de délicats consommés à la fine texture et de couleur bleutée : étonnants et savoureux. Quant aux fruits, ils peuvent, avec beaucoup de patience, car ils sont bien petits, se préparer comme le gombo, ce légume africain et asiatique que détestent cordialement les Occidentaux, rebutés par sa texture gluante – dont raffolent justement les habitants des pays tropicaux qui les relèvent généralement d’une bonne dose de piment… Personnellement, j’aime beaucoup la mauve, sous toutes ses formes.

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Encadré botanique 

Il existe dans nos régions d’Europe occidentale une dizaine d’espèces de mauve dont la plus répandue est probablement la mauve sylvestre (Malva sylvestris), une grande plante aux feuilles rondes et aux grandes fleurs… mauve, parcourues de stries violet foncé qui indiquent aux insectes où se diriger pour aller voler un peu de nectar… et ce faisant polliniser la plante en transportant le pollen d’une fleur à l’autre. Les autres espèces ont de petites fleurs blanches, nettement moins spectaculaires. Toutes présentent des feuilles arrondies, aux longs pétioles, bordées de larges dents, mais il arrive que les feuilles de la mauve sylvestre soient découpées en trois ou cinq larges lobes. 

Les fleurs de toutes les mauves, de toutes les Malvacées d’ailleurs, présentent en leur centre une structure particulière formée des nombreuses étamines soudées par leurs filets, laissant libre les anthères (c’est-à-dire les sacs contenant le pollen). À travers ce tube chevelu passent les styles que l’on aperçoit sous forme de longs filaments au sommet de la colonne staminale.

Recette : Fondue végétale

2 oignons, 2 cuillerées à soupe d’huile d’olive, 3 gousses d’ail, cumin, coriandre (grains), 400 g de feuilles de mauve, eau, 30 g de beurre

  • Dans une poêle à fond épais, faites rissoler les oignons hachés dans l’huile d’olive, avec une partie de l’ail, du cumin et de la coriandre.
  • Quand les oignons deviennent transparents, ajoutez les feuilles de mauve, lavées et coupées finement. Mélangez bien.
  • Réduisez le feu, couvrez et laissez mijoter jusqu’à ce que les feuilles soient réduites en purée. Surveillez de temps en temps et ajoutez un peu d’eau si nécessaire.
  • Pendant que la mauve cuit, faites revenir dans le beurre, le reste de l’ail, du cumin et de la coriandre écrasés. 

Versez l’ail et la coriandre dans la purée de mauve et disposez le plat au milieu des convives. Chacun se coupe des morceaux de pain qu’il trempe dans la fondue végétale.

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